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Tout cela, prenez-le en compte !

Homélie du dimanche 4 octobre 2020 (Mt 21, 33-43.45-46)



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Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu


En ce temps-là,

Jésus disait aux grands prêtres et aux anciens du peuple :

« Écoutez cette parabole :

Un homme était propriétaire d’un domaine ;

il planta une vigne,

l’entoura d’une clôture,

y creusa un pressoir et bâtit une tour de garde.

Puis il loua cette vigne à des vignerons,

et partit en voyage.

Quand arriva le temps des fruits,

il envoya ses serviteurs auprès des vignerons

pour se faire remettre le produit de sa vigne.

Mais les vignerons se saisirent des serviteurs,

frappèrent l’un,

tuèrent l’autre,

lapidèrent le troisième.

De nouveau, le propriétaire envoya d’autres serviteurs

plus nombreux que les premiers ;

mais on les traita de la même façon.

Finalement, il leur envoya son fils,

en se disant :

‘Ils respecteront mon fils.’

Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux :

‘Voici l’héritier :

venez ! tuons-le,

nous aurons son héritage !’

Ils se saisirent de lui,

le jetèrent hors de la vigne

et le tuèrent.

Eh bien ! quand le maître de la vigne viendra,

que fera-t-il à ces vignerons ? »

On lui répond :

« Ces misérables, il les fera périr misérablement.

Il louera la vigne à d’autres vignerons,

qui lui en remettront le produit en temps voulu. »

Jésus leur dit :

« N’avez-vous jamais lu dans les Écritures :

La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs

est devenue la pierre d’angle :

c’est là l’œuvre du Seigneur,

la merveille devant nos yeux !

Aussi, je vous le dis :

Le royaume de Dieu vous sera enlevé

pour être donné à une nation

qui lui fera produire ses fruits. »


– Acclamons la Parole de Dieu.



Homélie



● Je ne comprends pas la stratégie des vignerons homicides. Ils veulent devenir propriétaires de la vigne, et pour cela ils tuent l’héritier de la vigne. C’est absurde. Tuer l’héritier, c’est prendre tous les risques car après, on ne sait plus à qui reviendra l’héritage ! Plutôt faire corps avec l’héritier pour partager dès maintenant son héritage et peut-être un jour le posséder tout entier !


En France, nous n’avons pas été beaucoup plus malins que ces vignerons homicides. Nous aussi, en un sens, nous avons tué l’héritier. Au départ, cela partait d’une bonne intention : Église et État cherchaient leur indépendance et se sont émancipés réciproquement. Mais nous sommes tombés dans une séparation drastique où le Christ et l’Évangile n’ont plus vraiment droit de cité dans la vie publique. Les racines chrétiennes se perdent et la religion devient invisible.


Le meurtre symbolique de Dieu est une action grave et aux conséquences imprévisibles. Déjà l’empereur Tibère s’en émouvait dans le récit de Plutarque : “Si Dieu meurt, le monde est sens dessus dessous, l’homme n’a plus de point de repère. Le monde n’a plus ni haut ni bas”. Au final, peu se réjouissent du vide laissé par Dieu. Nietzsche se lamentait en disant : “Dieu, nous l’avons tué, vous et moi ! C’est nous, nous tous qui sommes les assassins ! [...] Comment nous consoler, nous, les meurtriers ?”


● La consolation, elle ne nous sera pas donnée par la prophétie d’Isaïe que nous avons entendue en première lecture. Dans ce texte, Dieu punit les hommes : “Je vais vous apprendre ce que je ferai de ma vigne : enlever sa clôture pour qu’elle soit dévorée par les animaux, ouvrir une brèche dans son mur pour qu’elle soit piétinée. J’en ferai une pente désolée ; j’interdirai même aux nuages d’y faire tomber la pluie.”


Ca, c’est ce que Dieu pourrait faire : oublier ses créatures, parce que ses créatures l’ont oublié. Mais Jésus donne un tout autre son de cloche dans l’Évangile. Il annonce qu’il sera rejeté et même tué… Pour autant il annonce qu’il continuera à prendre soin de sa vigne : “La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux !” Quand bien même l’héritier serait tué, Dieu s’entête à faire de nous les héritiers de sa vigne et continue d’en prendre soin. Il semble que plus le Christ est oublié, plus son Esprit redouble d’efforts pour que la vigne porte du fruit.


Jésus dit cela dans un autre évangile (c’est en Luc au chapitre 13) : “Père, laisse-moi prendre soin de ce figuier encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir.”


● L’Esprit est donc plus que jamais à l’oeuvre dans l’Église et dans le monde, soyons-en convaincus. Malheureusement, beaucoup peinent à discerner l’action de l’Esprit et portent un regard dur sur notre époque. A ceux-là, Saint Paul donne ce conseil (c’est dans la deuxième lecture) :


“Mes frères, tout ce qui est vrai et noble [autour de vous], tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela, prenez-le en compte. Et le Dieu de la paix sera avec vous.”


Frères et soeurs, je crois que le peuple croyant, le peuple que nous formons, c’est celui qui précisément “prend en compte” la vérité heureuse de notre temps. C’est celui qui continue de reconnaître chaque jour la présence et l’action bénéfique de Dieu dans le monde. “Là où le péché abonde, la grâce surabonde” dit encore Saint Paul (Rm 5, 20).


Plus nous serons conscients de la protection et des soins que Dieu nous prodigue au quotidien, moins nous donnerons prise à l’inquiétude ou à l’amertume. Le Seigneur prépare la terre ; il émonde la vigne ; il monte une tour pour nous protéger des bêtes sauvages ; il creuse un pressoir afin que nous puissions donner le meilleur de nous-mêmes, le meilleur vin.


Alors, comme le dit encore Saint Paul : “Ne soyez inquiets de rien ! Que la paix de Dieu garde vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus. Et en toute circonstance, rendez grâce !”


Amen.


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