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Riches et pauvres, tous ensemble

Lc 16, 19-31 (homélie du dimanche 29 septembre 2019)




Cette parabole a besoin d’être déminée !


Tout d’abord, rassurez-vous, Jésus ne cherche pas à nous décrire la géographie du séjour des morts. Si vous espériez un croquis topographique des lieux ou un relevé d’itinéraire pour parvenir sans encombre au paradis, passez votre chemin ! Jésus se contente ici de reprendre l’imagerie traditionnelle dans son pays, pour mieux se faire comprendre de son auditoire et aller plus vite à l’essentiel.


Second déminage : le récit semble dire que le riche est puni parce qu’il est riche, et le pauvre récompensé parce qu’il est pauvre. Ce n’est pas le cas !

En réalité, Jésus fait allusion à une histoire populaire bien connue de son temps en Judée, celle du pauvre scribe et du riche publicain Bar Mayan, qui avait vécu comme un impie notoire.

Tous les auditeurs de Jésus savaient parfaitement à quoi s’en tenir dès les premiers mots de la parabole… Il s’agit d’un riche qui ne s’occupe ni des hommes, ni de Dieu. Dans cette histoire, c’est l’irréligion et l’égoïsme qui sont punis, non le fait d’être riche. Et de l’autre côté, Lazare n’est pas récompensé parce qu’il est pauvre, mais pour sa piété et sa confiance.


Une fois écartées ces difficultés, la pointe de la parabole apparait plus clairement : la mort comme limite absolue. Que l’on ait vécu dans le lin et la pourpre, ou couvert d’ulcères, mendiant à la porte des autres... Un moment vient toujours où les choses prennent leur vraie valeur. Et dans la pensée de Jésus, ce moment-là doit éclairer toute la vie d’un croyant. La mort récapitule toute l’existence passée sur terre. Elle fixe aussi l’homme dans ses choix, de manière définitive. C’est donc avant qu’il faut se convertir ; c’est maintenant qu’il faut ouvrir les yeux sur les défis que nous avons à relever.


Le problème du riche de la parabole, c’est qu’il s’est laissé aveugler à longueur de vie. Il ne s’est intéressé ni à Dieu, ni aux hommes. Souvent, cela va ensemble. Je ne dis pas “toujours”, je dis “souvent”. Le riche n’a rien vu de l’amour de Dieu, il n’a pas vu non plus Lazare. Dieu et Lazare ont en commun d’avoir une soif abyssale de notre amour mais de ne rien réclamer, ou si peu. Lazare guettait les miettes qui tombaient de la nappe, comme Dieu espère toujours une miette de notre temps et de notre amitié.


Voyez comment, dans cette parabole, nul n’est inquiété tant qu’il n’a pas quitté ce monde. Lazare meurt dans l’oubli général ; le riche meurt à son tour, et toute la ville est là pour le porter en terre. Mais une fois passé la frontière, tout change. L’au-delà, c’est le domaine de Dieu ; et le grand abîme, c’est l’image de l’irréversible.


Ce n’est pas au ciel qu’il faudra nous préoccuper de la veuve et de l’orphelin, du migrant et du réfugié, de la préservation de notre petite planète bleue. Pourquoi le riche de la parabole a-t-il attendu de passer l’arme à gauche pour comprendre que les miettes d’un seul de ses repas auraient suffi à nourrir le pauvre une semaine entière ? C’est la vérité : à l’époque, les riches se servaient de la mie de pain comme nous de notre serviette. Beaucoup de ce pain partait à la poubelle, plutôt que de nourrir l’affamé. Toute ressemblance avec notre vie moderne doit nous préoccuper.


Jésus nous donne cette parabole dans l’espoir de nous amener à une prise de conscience débouchant sur de véritables changements de vie. Jésus vient de nous rappeler avec force son message de solidarité et, donnant l’exemple, il nous invite tous à la table de son Eucharistie, qui que nous soyons, riches et pauvres, tous ensemble.


Amen.


Source : Jean-Christian Lévêque, o.c.d.


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