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Pour le moment, laisse faire.

Homélie du dimanche 12 janvier 2020 (Mt 3, 13-17)



Nous avons du mal à comprendre en quoi un rite archaïque, comme celui du baptême, peut avoir un lien avec la grâce, avec le don de Dieu. Qu’est-ce que quelques gouttes d’eau versées sur un front dans un coin d’église ont à voir avec le surgissement, en nous, de la vie éternelle ?


Cela n’a rien d’évident. Spontanément, nous opposons d’une part ce qui est limité - comme une parole de bénédiction et un peu d’eau - et de l’autre ce qui est infini et universel, comme le don de la vie éternelle.


Qu’est ce que l’homme et ses rites anciens peuvent dire ou accomplir du don de Dieu ?


Peut-être rien.


Si c’est le cas, on comprend la réaction spontanée de Jean-Baptiste quand Jésus lui demande le baptême… “Toi, le Fils unique de Dieu ? Toi qui es Dieu, né de Dieu, Lumière né de la Lumière ? Toi, te plier à nos rites humains, descendre dans le Jourdain, plonger dans l’eau ? Mais qu’espères-tu ? Crois-tu que nos rituels peuvent d’une quelconque manière nous rapprocher de toi ?”


Jésus a cette réponse formidable : “Pour le moment, laisse faire car cela convient.” Qui a décidé que cela convenait ? Qui a décidé que, pour le moment, un peu d’eau aurait quelque chose à voir avec le Ciel ?


Dieu, bien sûr. Libre à chacun de le croire ou non. Mais c’est Dieu qui a choisi de se donner à nous dans la pauvreté de nos rites et dans la simplicité de notre langage. A y réfléchir, Dieu pourrait-il se donner à nous autrement ? S’il veut nous rencontrer, il faut bien qu’il nous parle, qu’il nous touche et, pourquoi pas, qu’il verse un peu d’eau sur notre tête.


Tout se passe comme si le baptême était un baptême à double forme, celle de l’eau et celle du ciel.

La forme de l’eau, c’est celle de Jean qui se tient dans le Jourdain, c’est ce vieux rite de la purification selon la Loi.

La forme du ciel, c’est celle de l’irruption du Père, du Fils et du Saint-Esprit, c’est la forme de Dieu.


Le lien entre les deux, c’est la parole de Jésus : “Pour le moment, faisons ainsi”.


Ce qui aurait pu n’être qu’un rite ancestral devient, par décret divin, la source de la vie éternelle pour tous les hommes.


Cette double forme, de l’eau et du ciel, ne se retrouve pas seulement dans ce passage d’évangile. A l’occasion de la Pâque juive, Jésus célèbre l’ancien rite de la première alliance mais il accomplit lui-même la vraie Pâque, celle de la résurrection, celle de la glorification dans le ciel. Au cours du repas, il partage le pain azyme et boit la coupe de bénédiction mais il fait de ce pain et ce vin le gage de sa présence éternelle.


Au fond, le chrétien, c’est celui qui voit double. Quand les autres hommes ne voient que l’eau, ile chrétien voit le ciel. Quand ses contemporains ne voient que le pain, le chrétien voit Dieu se donner en nourriture.


Cela ne devrait pas nous dérouter. Notre expérience quotidienne, c’est qu’au delà de nos vies, il y a plus que nos vies. Il y a la Vie. Une vie qui nous précède, nous dépasse et nous déborde. Au delà de nos prières, il y a plus que nos prières, il y a la grâce de Dieu à l’oeuvre en nous. Au delà de l’Église, il y a plus que l’Église, il y a le Royaume. Au delà de ce que nous percevons, il y a l’Invisible. Au delà de ce que nous disons, il y a l’Indicible.


Et c'est bien ainsi. Nous aussi, nous pouvons dire au Seigneur :

“Pour le moment, laisse faire car cela convient”.


Amen.


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