Homélie du jeudi 10 décembre 2020 (Mt 11, 11-15)
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là,
Jésus déclarait aux foules :
« Amen, je vous le dis :
Parmi ceux qui sont nés d’une femme,
personne ne s’est levé de plus grand que Jean le Baptiste ;
et cependant le plus petit dans le royaume des Cieux
est plus grand que lui.
Depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu’à présent,
le royaume des Cieux subit la violence,
et des violents cherchent à s’en emparer.
Tous les Prophètes, ainsi que la Loi,
ont prophétisé jusqu’à Jean.
Et, si vous voulez bien comprendre,
c’est lui, le prophète Élie qui doit venir.
Celui qui a des oreilles,
qu’il entende ! »
– Acclamons la Parole de Dieu.
Homélie
“Depuis les jours [d’Isaïe et] de Jean le Baptiste jusqu’à présent, le royaume des Cieux subit la violence, et des violents cherchent à s’en emparer”.
En écoutant ces paroles, nous pensons spontanément aux violences subies par l’Église : les persécutions en Irak ou en Iran, les agressions médiatiques en Occident, les limitations de nos libertés quand elles surviennent. Et, de fait, Isaïe et Jean-Baptiste ont souffert de violences extérieures à l’Église : Elie a souffert de persécution, il a été condamné à mort. Jean-Baptiste a été décapité.
Mais dans l’Évangile selon Saint Matthieu, l’apôtre vise en premier lieu les tensions internes à l’Église. Chapitre après chapitre, il montre comment les différents groupes religieux (Sadducéens, Pharisiens, Hérodiens et Scribes) s'acharnent les uns après les autres, font des alliances étranges et finalement s’accordent pour prendre le Christ au piège et le faire condamner à mort.
Cette violence interne est, de loin, la plus terrible. En méditant sur son propre cas, le cardinal Lubac disait que la souffrance imposée de l’extérieur est bien plus supportable que celle qui naît de l’intérieur de la communauté croyante. La trahison du frère et de l’ami est une épreuve redoutable.
Ainsi, la préoccupation de l’évangéliste Matthieu est que nous prenions en considération tout le négatif qui habite notre cœur : toute l'agressivité, l'envie, l'impatience qui s'expriment dans nos réflexes ; toutes les tristesses, les nostalgies et les regrets paralysants que nous laissons monter en nous.
Matthieu provoque cette introspection pour que résonne d’autant mieux la parole de Dieu transmise par le prophète Isaïe : "Ne crains pas. Je viens à ton aide. Je te prends par la main !" En réponse à tous nos mauvais sentiments, Isaïe nous donne son assurance : "Tu mettras ta joie dans le Seigneur ; dans le Saint d’Israël, tu trouveras ta louange”. Et quand, malgré nos efforts, tant de choses paraissent se dessécher dans nos cœurs, Dieu s’engage et promet : “Sur les hauteurs dénudées je ferai jaillir des fleuves, et des sources au creux des vallées”.
C’est ce que la théologie appelle “la grâce prévenante”. Dieu n’est pas seulement celui qui, de l’extérieur de nous-mêmes, cherche à faire entrer en nous le salut. Il est Celui qui, de l’intérieur, purifie et transforme. Sa puissance est à l'œuvre en nous. Et si nous trouvons en nous de mauvais sentiments, il y a, au plus profond, quelque chose de plus puissant qui s’appelle la grâce.
C’est elle que nous invoquons maintenant.
Amen.
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