Homélie du dimanche 20 mars 2022 (Jn 4, 5-15.19b-26.39a.40-42)
Évangile de Jésus-Christ selon Saint Jean
En ce temps-là, Jésus arriva à une ville de Samarie, appelée Sykar, près du terrain que Jacob avait donné à son fils Joseph. Là se trouvait le puits de Jacob. Jésus, fatigué par la route, s’était donc assis près de la source. C’était la sixième heure, environ midi. Arrive une femme de Samarie, qui venait puiser de l’eau.
Jésus lui dit : « Donne-moi à boire. » – En effet, ses disciples étaient partis à la ville pour acheter des provisions.
La Samaritaine lui dit : « Comment ! Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? » – En effet, les Juifs ne fréquentent pas les Samaritains.
Jésus lui répondit : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : ‘Donne-moi à boire’, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. »
Elle lui dit : « Seigneur, tu n’as rien pour puiser, et le puits est profond. D’où as-tu donc cette eau vive ? Serais-tu plus grand que notre père Jacob qui nous a donné ce puits, et qui en a bu lui-même, avec ses fils et ses bêtes ? »
Jésus lui répondit : « Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »
La femme lui dit : « Seigneur, donne-moi de cette eau, que je n’aie plus soif, et que je n’aie plus à venir ici pour puiser. Je vois que tu es un prophète !… Eh bien ! Nos pères ont adoré sur la montagne qui est là, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. »
Jésus lui dit : « Femme, crois-moi : l’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père. Vous, vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père. Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. »
La femme lui dit : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses. »
Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »
Beaucoup de Samaritains de cette ville crurent en Jésus. Lorsqu’ils arrivèrent auprès de lui, ils l’invitèrent à demeurer chez eux. Il y demeura deux jours.
Ils furent encore beaucoup plus nombreux à croire à cause de sa parole à lui, et ils disaient à la femme : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons : nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde.
Homélie
Quand le père Gica m’a présenté la paroisse au moment de lui succéder, il m’a dit : “Je n’ai qu’un seul regret, celui de ne pas avoir d’équipe pour accueillir les adultes qui demandent le baptême”. Je voudrais remercier Bernadette Jautzy et Bernard Citrain d’avoir accepté de porter cette belle mission.
Un vieux curé m’a dit un jour : “Dieu ne nous envoie des catéchumènes que dans les paroisses qui se préparent à les recevoir”. Et cela se vérifie chez nous aussi depuis quelques années. Aurélie et Stella viennent de demander à notre évêque le baptême. Monseigneur Crépy leur a répondu favorablement il y a tout juste deux semaines. Elles seront donc baptisées au cours de la vigile pascale.
Les trois dimanches qui précèdent Pâques, Aurélie et Stella sont invitées à vivre les scrutins au milieu de nous . Le mot scrutin vient du verbe “scruter”. Aurélie et Stella scrutent avec nous la Parole de Dieu : ce dimanche l’évangile de la Samaritaine, puis celui de l’aveugle-né, enfin celui du retour à la vie de Lazare. Ce ne sont pas les évangiles qui figurent dans vos livres de messe mais ceux choisis par l’Église pour baliser le chemin des futurs baptisés. Ces trois évangiles sont autant de révélations sur l’identité de Dieu :
La Samaritaine nous apprend que Dieu est le seul dont l’amour comble.
L’aveugle-né nous apprend que Dieu est le seul qui éclaire notre chemin sur la terre.
Enfin, Lazare nous apprend que Dieu est le seul qui donne un but à notre existence : la vie éternelle.
Aurélie et Stella vont scruter avec nous ces évangiles. Mais Dieu nous scrute aussi. C’est le deuxième sens des scrutins. Dieu sonde nos reins et nos cœurs pour mesurer si, véritablement, nous voulons devenir ses disciples. Devenir chrétien, c’est épouser une nouvelle manière de vivre, à travers des comportements modifiés. Le temps des scrutins est donné aux catéchumènes afin qu’ils identifient ce qui doit changer dans leur vie.
La vie chrétienne est un choix. Quand on choisit d’être chrétien, cela signifie qu’on adopte une identité particulière. C’est un choix dans la manière de vivre. On choisit d’essayer de mettre en œuvre la parole de Dieu dans tous les domaines de notre existence. Cette résolution nous oblige à renoncer à un certain nombre de choses ou à choisir un certain nombre de comportements qui ne sont pas ceux de tout le monde. Comme le disait le précédent pape, "nous sommes en train de passer d’un christianisme sociologique à un christianisme de liberté. Le christianisme de liberté suppose que nous soyons disposés à engager notre liberté et à prendre les décisions qui correspondent."
Dans ce premier évangile des scrutins, c’est notre désir que le Christ interroge. Jésus a soif de nous. Il a soif de la Samaritaine comme il a soif de tous les humains. Une soif qu’il exprime avec ces simples mots : “J’ai soif. Donne-moi à boire”. Ces mots, il les répétera sur la croix.
La Samaritaine aussi a soif, mais elle ignore que seul le Christ peut combler son cœur. Sa soif et son désir, elle les a colportés de porte en porte, de mari à mari, sans jamais être exaucée. Et peu à peu, dévorée par ses propres désirs, et dévorant l’un après l’autre ses partenaires du moment, elle a fini par rester seule. Seule, mais toujours torturée par la soif d’aimer et d’être aimée.
Remarquez qu’en matière d’amour, le Christ ne fait pas la morale. Il ne brandit pas le décalogue de Moïse. Il ne condamne pas la Samaritaine. Jésus est ému, il prend pitié et lui propose de son eau vive.
L’eau vive que Jésus propose à la Samaritaine, c’est lui-même. Le Christ se donne à aimer. Proposition à prendre ou à laisser. Et Dieu nous scrute : “M’aimes-tu, comme je t’aime ? As-tu soif de moi, comme moi, j’ai soif de toi ?”
Souvent, dans ma prière, je réponds à Dieu : “Oui Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime. Trop peu, trop mal, mais je t’aime”. Il nous faut souvent revenir à ce premier élan de l’amour, aussi modeste et fragile soit-il, et le présenter à Dieu. Ainsi vivons-nous de l'Alliance, et l’échange merveilleux se poursuit, plein de promesses.
Amen.
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