Jésus pédagogue
Homélie du vendredi 15 septembre 2020 (Lc 9, 18-22)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce jour-là, Jésus était en prière à l’écart.
Comme ses disciples étaient là,
il les interrogea :
« Au dire des foules, qui suis-je ? »
Ils répondirent :
« Jean le Baptiste ; mais pour d’autres, Élie ;
et pour d’autres, un prophète d’autrefois qui serait ressuscité. »
Jésus leur demanda :
« Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? »
Alors Pierre prit la parole et dit :
« Le Christ, le Messie de Dieu. »
Mais Jésus, avec autorité,
leur défendit vivement de le dire à personne,
et déclara :
« Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup,
qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes,
qu’il soit tué,
et que, le troisième jour, il ressuscite. »
– Acclamons la Parole de Dieu.
Homélie
La question “Qui suis-je ?”, Jésus la pose en deux temps. D’abord à la foule, ensuite aux disciples.
La réponse de la foule, c’est celle de n’importe qui, celle du tout-venant. Mais la réponse du disciple, c’est la nôtre, celle qui nécessite une reconnaissance et une confiance. Il y a certainement là une pédagogie de la part du Seigneur qui veut aider chacun à faire le saut de la foi.
Si nous nous intéressons d’abord aux opinions de la foule: elle prend Jésus pour Jean-Baptiste ou pour Elie ou pour un autre prophète qui serait ressuscité.
Jean-Baptiste, on comprend la méprise : toute la foule n’était pas au courant que Jean venait d’être décapité. En allant au désert, la foule espérait bien tomber sur Jean-le-Baptiste, peut-être plus que sur son cousin Jésus qui, à l’époque, était beaucoup moins connu.
D’autres prennent Jésus pour Elie. Sans doute parce que Jésus vient à peine de réaliser le miracle des pains. Or Elie avait lui aussi fait un miracle en donnant de la farine et de l’huile en abondance à la veuve de Sarepta. Et dans l’Ancien Testament, le prophète Malachie avait annoncé qu’Elie reviendrait sur terre avant la fin des temps (Ml 3, 23). Alors, prendre Jésus pour Elie, pourquoi pas ? La foule ne s’est trompée que de quelques jours puisque le récit de la transfiguration suit immédiatement l’évangile de ce soir. A la transfiguration, il y avait bien Elie et Moïse aux côtés de Jésus.
D’autres disent : c’est un prophète ressuscité, sans préciser lequel. Là encore, la foule n’est pas si loin de la vérité. Bientôt, Jésus se relèvera d’entre les morts. Mais ce n’est pas encore arrivé.
Ce qui est beau, c’est que chacun semble s’approcher de la vérité, chacun semble disposer d’une parcelle de la vérité. Et Jésus s’appuie sur ces étincelles de vérité pour conduire ses disciples à la vérité tout entière.
“Et vous, qui dites-vous que je suis ?” demande ensuite Jésus. En disant : “Tu es le Christ”, Simon-Pierre dit de Jésus qu’il est le Messie, c’est-à-dire celui qui a été choisi et consacré par Dieu pour faire advenir son Royaume.
C’est exact mais c’est incomplet. Certes, avec Jésus le Royaume de Dieu est parmi nous. Mais ce Royaume n’est pas celui qu’espérait Simon-Pierre. Jésus ne sera pas un chef de guerre triomphant, libérant Israël des armées romaines mais un Messie crucifié. Et il faudra encore beaucoup de temps avant que Simon-Pierre ne l’accepte. D’où la demande de Jésus à Simon-Pierre qu’il ne répande pas la nouvelle.
Là encore, Jésus fait oeuvre de pédagogie. Tout à l’heure, il incitait les disciples à s’engager dans la foi; maintenant, il ouvre les yeux sur la vraie nature de sa mission : une mission de service et non de puissance.
Je crois que nous pouvons remercier le Seigneur d’user de la même patience et de la même pédagogie avec nous. Jésus sait nous attirer à lui, puis corriger patiemment les fausses images que nous avons de Dieu. C’est ainsi que notre foi, avec le temps, devient plus vive et belle.
Amen.